Parasha Nitsavim: la Téchouva n’est pas au ciel
Par Sophie Bismut, étudiante rabbin
Nous lisons la parachat Nitsavim ce dernier chabbat qui précède Roch Hachana.
L’éloquence de Moïse, l’homme bègue du buisson ardent, atteint des sommets. Ce sont ses derniers
jours de vie, son dernier même selon Rachi. Moïse adresse un discours vibrant aux enfants d’Israël
qui sont dans les plaines de Moab et s’apprêtent à entrer en terre d’Israël. Il s’adresse à tous,
hommes et femmes, adultes et enfants, étrangers qui vivent avec eux, quel que soit leur fonction,
leur statut social.
Il renouvelle l’Alliance : « Vous êtes placés aujourd’hui vous tous, en présence de l’Eternel (…) afin
d’entrer dans l’alliance de l’Éternel ton Dieu ». Sûrement pressent-il les difficultés à venir. Il se
montre sévère envers ceux qui se détourneraient de Dieu et de l’Alliance mais affirme qu’il est
toujours possible à celui qui se détourne de revenir.
Son discours se termine avec ces versets magnifiques de simplicité et de force :
« Certes, ce commandement (ha-mitsva ha-zot) que je te prescris aujourd’hui n’est pas trop ardu
pour toi, ni placée trop loin. Elle n’est pas dans le ciel pour que tu dises : « Qui montera pour nous au
ciel et nous l’ira quérir, et nous la fera entendre afin que nous la fassions ? » Elle n’est pas non plus
au-delà de la mer, pour que tu dises : « Qui traversera pour nous la mer et nous l’ira quérir, et nous la
fera entendre afin que nous puissions la faire ? ». Non, la parole est tout près de toi, dans ta bouche
et dans ton cœur, pour que tu la fasses » (Dt. 30:11-14).
Quel est « ce commandement / ha-mitsva ha-zot » ? La plupart des commentateurs y voient une
référence à toute la Torah. Moïse nous rappelle ainsi que la Torah et les mitsvot sont à notre portée.
Nous savons bien que la compréhension de la Torah et l’observance des mitsvot sont difficiles, ardus.
Pour autant, ils sont possibles pour tous. La Torah n’est pas réservée à une élite d’érudits ou de
« religieux ». Elle est pour tous : hommes, femmes, adultes, enfants, quels que soient notre
profession, notre niveau de richesse, notre statut social. Nous avons tous une part dans la Torah,
nous avons tous une voix à porter dans la conversation infinie entre le ciel et la terre.
Alors que nous approchons de Roch Hachana, du « jour du jugement », il est aussi intéressant de se
tourner vers une autre lecture de ce passage. Ramban explique en effet que ces versets font
référence au commandement spécifique de la téchouva, le repentir ou plus littéralement le retour.
Les versets précédents ce passage décrivent comment Israël reviendra à Dieu et sera restaurée sur sa
terre. Selon Ramban, c’est la techouva même qui constitue « ce commandement que je te prescris
aujourd’hui ».
À la veille des « jours redoutables » qui vont de Roch Hachana à Yom Kippour, nous sommes invités à
engager un examen personnel de nos vies. Il nous faut faire le point de l’année passée, de nos
réussites et de nos faiblesses, de nos manquements et examiner ce que nous pouvons changer dans
cette année qui s’ouvre. La tâche est difficile mais, vient nous rappeler et nous encourager. La paracha
de cette semaine, nous ne devons pas la considérer trop difficile pour nous. Elle est réalisable.
La techouva n’est pas au ciel ni au-delà des mers. Ce n’est pas seulement une belle idée ou un
concept théorique, mais une entreprise à notre portée. « La parole est tout près de toi, dans ta
bouche et dans ton cœur pour que tu la fasses ». La techouva est dans nos bouches, par les mots que
nous prononcerons pour reconnaître nos manquements et nos fautes. Elle est dans nos cœurs par la
sincérité et l’engagement avec lesquels nous entrons dans ces journées du jugement. Et elle est aussi
dans nos actes par lesquels nous entreprenons de changer nos vies.
Photo : Fares Hamouche – Unsplash